#InnovActeur : Interview de Emerson PAIM, CEO de Kubinga, service de mobilité et de livraison
Dans cette interview, Emerson PAIM présente Kubinga, un service de mobilité et livraison en Angola, dont il est le CEO.
En Angola, il y a de fortes contraintes de mobilité dans les grandes villes. De plus, le taux de chômage est important et en croissance, alors que la majeure partie des emplois sont dans le secteur informel.
Kubinga propose un écosystème qui met en lien des propriétaires de voitures et des personnes sans emploi pour offrir une option de mobilité plus économique aux Angolais. Le service crée donc de l’emploi pour ces agents, qui fournissent des services de taxi ou de livraison de divers produits.
Depuis l’interview réalisée au Seedstars Summit en Avril 2019 à Lausanne, Kubinga a étendu ses services à la livraison de repas ou d’achats auprès de divers commerçants. Pour cela, une autre application a été développée pour référencer les commerces et permettre de passer commande.
Cette interview s’inscrit dans une série de rencontre et d’interview d’innovActeurs initiée pour :
- faire connaitre des InnovActeurs qui s’impliquent pour changer le monde,
- partager des retours d’expériences pour montrer l’usage de la technologie et de l’innovation pour répondre à des enjeux sociétaux,
- inspirer chacun à devenir un InnovActeur grâce au potentiel qu’offre la technologie.
Pour en savoir plus sur la démarche et y participer, je détaille le projet dans l’article « mon défi : publier 35 interviews d’innovActeurs en 18 semaines » .
Je vous laisse découvrir en images le service Kubinga (voix en anglais et sous-titré en français) !
Transcription de l’interview
Bonjour, je m’appelle Emerson, je suis le PDG de Kubinga. Kubinga est une application disponible en Angola depuis mai de l’année dernière (2018).
Je voudrais vous présenter ce que signifie Kubinga. Dans notre langue maternelle, le Kimbundu, Kubinga signifie « demander ».
La problématique
Nous avons créé ce concept pour résoudre de vrais problèmes concernant :
- les contraintes de mobilité au sein des villes que nous avons et qui sont énormes,
- le taux de chômage, qui est en fait élevé dans notre pays,
- et le secteur informel, qui mobilise probablement une grande partie des emplois dans nos pays, non seulement en Angola mais aussi dans d’autres pays africains et d’où provient la majeure partie de l’économie.
Kubinga, un écosystème de partage
Nous avons donc construit cet écosystème pour être en mesure de :
- créer des opportunités pour les personnes qui ont des voitures afin de maximiser leurs revenus passifs,
- et donner l’opportunité aux personnes sans emploi, de conduire ces voitures.
Très souvent, des gens parcourent entre cinq et dix kilomètres pour aller au travail. Ils garent la voiture et la voiture reste là toute la journée. Et d’un autre côté, nous avons beaucoup de chômeurs.
Pourquoi ces personnes sans emploi, ne pourraient-ils pas aller chez les personnes qui ont une voiture, conduire leur voiture, les déposer au bureau ? Et pendant la journée, au lieu de payer le stationnement, donner l’opportunité à ces chômeurs de faire des courses et de générer des revenus pour le propriétaire de la voiture, pour eux-mêmes, et de créer un nouvel environnement où l’économie tourne un peu plus vite ?
Nous sommes donc essentiellement dans le système de l’économie de partage pour nous assurer que nous gagnons tous pour la même source de service qui a été fournie et essayons de lutter contre le taux de chômage qui est énorme.
Un défi démographique en 2030
D’ici 2030, la majorité des villes comptera plus de 10 millions d’habitants. Au moins cinq villes d’Afrique compteront plus de 10 millions d’habitants, dans le centre-ville des capitales. De plus, la majorité de ces personnes auront entre 15 et 65 ans, ce qui correspond à la population active.
Nous devons donc trouver un moyen d’utiliser la technologie pour résoudre ce problème à venir dans nos communautés, et nous assurer que nous le faisons de manière à ce que non seulement les personnes aient la quantité exacte de revenus dont elles ont besoin pour survivre, mais qu’une part puisse être prélevée par l’Etat pour soutenir l’investissement nécessaire pour pouvoir développer notre système d’éducation, notre système médical et d’autres choses dont nous avons besoin dans nos communautés.
C’est donc ce qui nous a poussés à créer Kubinga.
Formation des agents
Nous travaillons donc aussi en termes de formation parce que nous comprenons que la majorité des gens dans nos communautés n’ont pas accès à certaines choses. Nous leur fournissons donc une formation. Après les avoir recrutés, nous expliquons comment l’application fonctionne, comment ils peuvent faire un bilan comptable, afin qu’ils puissent comprendre combien ils peuvent gagner et planifier des objectifs afin d’évaluer les revenus à la fin de le mois.
L’autre partie de la formation est de faire comprendre l’importance de la relation client, comment traiter le client, lui poser quelques questions et parler de choses dont nous pouvons réellement parler dans nos communautés, surtout maintenant que l’Afrique retient beaucoup d’attention de pays étrangers. Ainsi, le tourisme pourrait être l’une des choses que nous attaquerons ensuite. Et si les chauffeurs connaissent les meilleurs endroits, les meilleurs restaurants, les bons coins de la ville, comme nous avons l’habitude de dire, cela attirera davantage de gens pour visiter nos pays et offrir un meilleur environnement.
Et pour finir, nous les formons également à la conduite préventive (défensive). Je ne sais pas pour les autres villes, j’ai vu des photos ou vidéos de certaines villes, mais dans notre ville, la conduite a tendance à être un peu agressive. Nous essayons donc d’expliquer, dans le cadre de la formation, que cela est vraiment important, non seulement pour la sécurité du client avec lequel ils font le trajet, mais aussi pour eux-mêmes car ce sont eux qui subviennent aux besoins de leurs familles. Et nous ne pouvons pas laisser tomber nos familles sans ressources venant d’un homme ou d’une femme, car nous avons déjà des femmes dans notre écosystème et nous en sommes vraiment heureux.
Une croissance rapide
Actuellement (avril 2019), nous avons 71 voitures immatriculées. Certaines voitures sont conduites par plus d’une personne, ce qui signifie que nous avons plus de 90 personnes qui font partie de l’écosystème. Nous avons commencé en mai de l’année dernière (2018), et à jour (avril 2019), nous avons plus de 11000 téléchargements de notre application et nous avons réalisé plus de 22000 trajets payants.
Donc, nous grandissons à un rythme rapide, le taux de croissance moyen depuis nos débuts jusqu’à maintenant est de plus de 42% et le mois dernier, nous avons atteint l’objectif de plus de 200 trajets par jour, ce qui nous a rendu très heureux.
Merci beaucoup de nous avoir donné cette occasion de vous parler. Et comme on dit dans mon pays, Nga Sakidila, ce qui veut dire merci.
Retrouvez d’autres InnovActeurs qui changent le monde grâce à la technologie et l’innovation dans la section « InnovActeurs » .